Le gouvernement congolais a suspendu, ce mardi 29 octobre, toutes les activités du parti Alliance des Travaillistes pour le Développement (ATD), dirigé par José Makila Sumanda, ancien ministre et proche de Joseph Kabila.
La décision, signée par le Vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, évoque des “actes de haute trahison” et une “adhésion à la philosophie d’agression du pays”.
Selon Kinshasa, José Makila a participé, les 14 et 15 octobre, à un conclave organisé à Nairobi par Joseph Kabila, présenté par les autorités comme le principal instigateur d’un “mouvement d’agression” lié à la rébellion du M23/AFC, soutenue par le Rwanda.
La présence de l’ancien ministre à cette rencontre est interprétée comme un ralliement politique à un mouvement armé, en violation de la Constitution et de la loi sur les partis politiques.
“Le fait pour M. Makila et son parti de rallier M. Joseph Kabila dans sa philosophie d’agression est de nature à porter atteinte à l’unité du pays et à la souveraineté nationale”, souligne le communiqué officiel.
Une procédure expéditive et une loi appliquée avec brutalité
Mais derrière la fermeté affichée, la méthode interroge.
La suspension d’un parti politique, selon la loi congolaise, est une mesure exceptionnelle, qui suppose un processus contradictoire, l’examen des faits et la possibilité d’un recours.
Or, dans le cas de l’ATD, comme pour le PPRD de Joseph Kabila quelques jours plus tôt, la décision a été prise unilatéralement, sans débat public ni notification préalable.
Une application “violente” de la loi, selon plusieurs juristes, qui y voient une instrumentalisation du droit à des fins politiques.
Deux partis ciblés, des interrogations sur la sélectivité
Autre question soulevée : pourquoi seuls le PPRD et l’ATD ont-ils été sanctionnés, alors que d’autres formations politiques étaient également présentes au conclave de Nairobi ?
Ce silence officiel nourrit le sentiment d’un traitement sélectif, ciblant prioritairement les figures liées à l’ancien régime.
De quoi renforcer l’idée que cette offensive politique dépasse la simple logique de sécurité nationale.
Entre fermeté et verrouillage politique
Déjà condamné pour “haute trahison”, Joseph Kabila est accusé d’entretenir des liens politiques et logistiques avec le M23/AFC.
Pour le pouvoir de Félix Tshisekedi, la suspension de l’ATD s’inscrit dans une stratégie de fermeté face à ce qu’il qualifie de “menaces internes et externes”.
Mais pour une partie de l’opinion, elle illustre surtout un durcissement du régime et une tentation de verrouiller l’espace politique à l’approche des prochaines échéances.
Alors que la RDC continue d’accuser Kigali d’occuper une partie de son territoire à l’Est, la ligne entre vigilance républicaine et répression politique devient de plus en plus floue.
Et la question demeure : dans une démocratie en construction, jusqu’où peut-on défendre l’État sans étouffer le débat politique ?
