À Washington, dans un décor poli, Félix Tshisekedi et Paul Kagame entérinent ce jeudi 4 décembre, un accord de paix présenté comme « historique ». Un médiateur américain triomphant, des promesses de stabilité, des mots lourds de symboles. Mais pendant que les stylos tracent des signatures à des milliers de kilomètres, l’Est de la RDC continue de vibrer sous le fracas des armes.

Et c’est là que tout l’enjeu se joue : la paix ne se décrète pas à la lumière des caméras. Elle se prouve là où les populations vivent, là où elles fuient, là où elles meurent.

Un accord qui apaise les chancelleries, pas encore les Congolais

Oui, l’entérinement de Washington est une avancée diplomatique. Il fallait un cadre, une pression internationale, une injonction claire à la responsabilité. Il fallait surtout que le Rwanda reconnaisse enfin, noir sur blanc, les engagements sur la cessation des soutiens aux groupes armés et sur le retrait de ses forces. Il fallait que Kinshasa obtienne un levier, un appui, une garantie.

Mais cette paix écrite dans l’encre américaine reste suspendue dans l’air tant que le terrain, lui, ne change pas.

À Rutshuru, à Masisi, à Kanyabayonga, à Minembwe… on ne signe pas la paix. On la vit. Ou on continue de la subir.

La RDC au bord de la patience

Le peuple congolais n’est pas naïf. Il connaît trop bien les accords célébrés au loin et piétinés au pays. Les Congolais savent que la signature ne signifie rien si les groupes armés poursuivent leurs avancées, si les armées continuent de s’accuser mutuellement, si les déplacés ne rentrent pas chez eux, si les routes restent coupées, si l’État n’impose pas sa souveraineté sur chaque colline.

Ce scepticisme n’est pas du cynisme. C’est de l’expérience.

C’est cette fatigue nationale, profonde, qui traverse chaque commentaire, chaque réaction, chaque murmure venu de Goma, Beni ou Bunia.

Une paix qui doit s’imposer, pas se réciter

Aujourd’hui, la responsabilité est totale. Pour Washington, qui s’engage publiquement dans un dossier longtemps ignoré. Pour Kigali, qui doit prouver que les mots ne sont pas une diversion diplomatique. Pour Kinshasa, qui doit transformer cet accord en actes, en sécurité, en souveraineté réelle.

Il faudra plus qu’un sourire, plus qu’un discours, plus qu’un communiqué. Il faudra des résultats. Et vite.

Parce que pendant que les chefs d’États se congratulent, le Kivu, lui, ne peut plus attendre.

La paix n’est crédible que lorsqu’elle fait taire les armes

L’accord de Washington pourrait devenir la fondation d’une nouvelle relation régionale. Aussi, s’il s’appliqué sans calcul, permettrait enfin aux Congolais de l’Est de respirer.

Mais tant que les combats persistent, tant que la peur demeure, tant que les déplacés s’entassent sous les bâches bleues, tant que les collines du Nord-Kivu ne connaissent que le bruit des drones et des mortiers…

Alors non, la paix n’a pas encore commencé. Elle ne commencera que lorsque le terrain confirmera ce que les chefs d’États ont promis.

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